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Dites peinture, elle répond nature. Dites couleur, elle répond fleur !
 

« Ses tulipes desséchées courbent l’échine : elle les a gardées chez elle, dans un vase, et voilà qu’elles rendent l’âme… Clic clac, une photo pour ralentir leur dernier soupir. Puis voilà des grands formats qui ne sont ni des natures mortes ni des buissons ardents. Mais des graines de solitude, fanées et foisonnantes, qu’elle a embaumées à sa façon, afin que le souvenir des choses inconsolables ne devienne ni trop grave ni trop lourd à porter », dit d’elle le journaliste David S.Tran dans un joli texte du catalogue de l’exposition …Végétales, étales…, qu’Elisabeth mettait en scène à l’ été 2002, dans l’église romane de Marnans, en Isère.
 

Une peinture juste, pas juste une peinture. Une peinture personnelle ...

La peinture d’Elisabeth est fine, cristalline, elle joue des transparences ; le grain d’une beauté qui se fane sous une brume picturale, un flou poétique - la juste imprécision - comme quelque chose qu’on toucherait du doigt avant l’évanescence. Incisive tout en évitant la netteté des contours, elle dépose un voile, un non-dit, un indéfinissable lové dans les plis des corolles. Charnu, charnel, l’intime tend vite à la démesure, porté aux nus, le temps peut-être d’une mise au point. L’outil photographique constitue d’ailleurs la première étape de son processus. Elle piège d’abord derrière l’objectif le dernier souffle des fleurs, la transmission d’un vécu, sélectionne puis retranscrit cet entre-deux dans une touche poussée à l’extrême, aux allures parfois hyperréalistes - couleur « mort-rose »-.
Les regards ainsi se troublent, sous l’esthétique d’un mentir vrai, quant au détour d’un tondo, le spectateur devient voyeur, témoin ou défloreur...


L’artifice est redoublé lorsque les fleurs, presque inertes, sont recouvertes de matière. L’artiste les plonge dans la peinture fraîche, leur donnant ainsi une dimension sculpturale : les fastes déluges comme elle les appelle. Figées là encore par le médium photographique avant d’être peintes, la mise en abîme se poursuit et les supports se confondent : fleurs de céramique ou de porcelaine ? De nouveau vulnérables, froides, cassantes, - fragment d’épines - ou alors juste séduisantes, acidulées, pop en morceaux de plastoc, quoiqu’un peu écœurantes. Elles posent pour un dernier cliché: modèle sur papier glacé – version vieilles peaux !

C’est justement l’enveloppe corporelle qu’elle façonne pour ses Boutons de chevreuil, ses Roses sanglier qui constituent une autre facette de son œuvre. Ses fleurs animales viennent nous rappeler la communion entre les règnes, le patrimoine génétique commun. Elisabeth Gilbert Dragic se plait à sortir du cadre pictural au profit de l’installation ou de la performance comme quand elle sacrifie un cochon, selon la coutume rurale, pour partager le repas avec les habitants et offrir à la peau de l’animal une vie nouvelle. Sa démarche est complète, prend alors une veine plus cérémoniale, rituelle. Poétique ou délicatement monstrueuses, les fleurs gagnent du terrain avec le bouquet de la jardinière, performance dans laquelle l’artiste, face caméra, se confronte à l’épineuse étreinte, amassant des fleurs jusqu’à n’en plus pouvoir. C’est là son manifeste.
 

Loin d’être anodin, le motif floral lui permet d’interroger tour à tour le « hors sol », les racines, le rapport à la terre. Elle parle d’ailleurs d’ensevelissement, d’immersion, se situant ainsi aussi bien du côté du souvenir personnel que d’une mémoire sociétale. Des rôles qu’on attribue à la femme, - vierge, sorcière, jeune fille en fleur ?... – à un discours plus large sur les cycles du temps, partout les « fleurtes » d’Eros et Thanatos s’invitent au jeu du qui s’y frotte s’y pique ! Laëtitia Blanchon, Historienne de l'art


Formation
Diplômée de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Lyon, 1993-1994
Diplôme d’architecture d’intérieur – Ecole d’Art Appliqué de la Ville de Lyon -1988-1992

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